Cela peut paraître antithétique en même temps qu’étrange. La neige est au printemps ce que la pluie est à l’été, pourtant, elle est aujourd’hui la bienvenue ! Voilà bientôt quinze jours qu’il n’avait  plu ni neigé et après ces derniers mois d’excès on était en droit de s’inquiéter : cela allait-il durer ? Une sécheresse pouvait-elle s’immiscer dans ce beau retour à la vie ?

Tous les recueillis du week-end sont au chaud, dans leur terre adoptive. Après la léthargie de l’hiver, il prend au jardinier une frénésie soudaine, incontrôlée bien qu’explicable. L’inactivité floricole et horticole assèche l’esprit, probablement échangeons nous nos sèves respectives, sang rouge avec sang vert, rhésus compatibles- pour ne faire corps qu’avec notre seul salut,  Terre-Mère nourricière à qui nous devons et devrons toujours tout. La culture nourrit notre corps et notre esprit à l’instar de la culture livresque qui nous éclaire de l’expérience d’un Vilmorin ou d’un Linné… Alors, malgré les rotules qui grincent, les tendinites naissantes, les muscles douloureux, nous ressentons une immense exaltation qui anesthésie tous ces petits maux qui n’auront jamais le dessus sur le plaisir de la contemplation. Aimer voir une fleur, une feuille, la silhouette d’un arbre, la hampe d’un épilobe, c’est aimer voir un doux visage, un corps gracile qui se meut comme dans un rêve. Poésie du jardin qui ne veut qu’embellir le monde, générosité de la nature qui n’attend qu’un peu de don de soi pour éclater de mille couleurs… La neige n’a pas tenu !

F.